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Quand je ne la ferme pas, je l'ouvre.
9 juillet 2005

Il faut parler comme Ernest Antoine

Avant-hier, sur France Inter, un journaliste parlait de la couverture de la presse britannique sur la candidature de Paris aux Jeux Olympiques de 2012. Suivaient quelques réactions de membres (français) du CIO, qui s’agaçaient du ton proverbialement disgraceful des journaux d’Outre Manche.

Le lendemain, quelques membres du CIO (les mêmes ?) commentaient la blague anti-britannique de Jacquou le Croquant (« L’agriculture anglaise n’a jamais donnée à l’Europe que la vache folle »), assurant le journaliste inquiet du peu d’effet de cette pique de mauvais goût sur le jugement des autres membres qui devaient se décider dans la journée.

L’une, l’autre, ou les deux considérations ont manifestement été fausses. Cela ne fera qu’ajouter une ligne à la longue liste des écarts aveuglément nationalistes et autres de médias qui se veulent (et même se considèrent) objectifs.

Depuis que le rêve Parisien est parti aux oubliettes, nous pouvons à nouveau entendre parler de notre sujet préféré (nous) à longueur de journée. Et qu’entendons nous ? Que, depuis ce refus du CIO, depuis le Non  la constitution, nous étions déprimés. Si, si, arrêtez de rigoler, nous touchons le fond. Nous n’avons pas confiance en nous, nous avons peur de l’avenir, nous tremblons devant la mondialisation, nous nous faisons tout petit devant elle, tentant de protéger de nos maigres plumes mouillées les quelques derniers acquis sociaux hérités d’un temps brillantissime, certes, mais révolu. Et que nous le sentions bien, ça.

Je ne sais plus quel journaliste a dit ça, mais en l’écoutant, ça me semblait évident que c’était lui qui était déprimé. Il s’était enfilé le champagne prévu pour fêter les Jeux à Paris, ça avait un goût amer. Il avait mal dormi, il faisait trop chaud, et il ne pouvait pas se payer de clim à cause des impôts. Il s’était mollement traîné à la rédaction, et au moment d’écrire sa chronique quotidienne, il s’est dit basta, tant pis pour le journalisme, j’ai envie de crier ma haine, mon désespoir et ma rage, je vais écrire sur moi. Le rédacteur est passé derrière, lui a conseillé d’aller se coucher, et a remplacé « je » par « les Français ». C’est bon, ça coco, et en plus, ça évite les frais de psychanalyse…

Manquerait plus que ce soit encore un Américain qui gagne le tour de France…

Je ne me lasse pas de cette merveilleuse pirouette à l’occasion de ces Jeux Olympiques. Avant, c’était l’union, l’espoir, tous pour la victoire. Après, c’est la faute à la déprime française, à ces mal-comprenant qui ont du mal à se contenter d’une dose jeux pour faire passer d’autres pilules.

La France est un grand malade qui refuserait de se faire soigner. Et vu que le sport (accompagné d’exubérance nationaliste), c’est bon pour la santé, ça va pas s’arranger.

Mais après tout, c’est tant mieux. Car qu’est ce qu’on en attendait, de ces J.O. ? Quelques milliers de touristes supplémentaires ? Une vitrine sur le monde entier ? Ah oui : l’occasion de créer un village olympique modèle en matière d’urbanisme et d’environnement (savoir que Lafarge était dans les supporters du projet Parisien me fait douter, mais passons). C’est râpé. Perdu le village modèle qui pollue pas. On va quand même garder la rénovation de deux ou trois stades, parce que ça, c’est important. Sans écouter les esprits chagrins qui rappelleraient que c’est lors de son déclin que l’Empire Romain a construit le plus de cirques…

Bon. Maintenant, ce sont les Anglais qui vont pouvoir mettre leur programme en application. Qui d’ailleurs ressemble au projet parisien comme deux gouttes de fleuve. Ils auraient copié ? Plus probablement, ils surfent sur l’inquiétude environnementale généralisée.

Monsieur Sylvestre (pas celui des Guignols, le chroniqueur économique de France Inter) a dit quelque chose de pas con. Mais c’est peut être parce que lui aussi était déprimé, et sa déprime ressemble parfois fort à mon enthousiasme.

Monsieur Sylvestre analysait l’évolution du G8 à travers les ans, qui est passé du traitement des questions strictement économiques au traitement des sujets d’actualité sans plus d’efficacité d’ailleurs. Les dirigeants du G8 avouent maintenant sans aucun complexe que le G8 ne gère plus rien de ce qu’il gérait par ailleurs très mal, qu’il a complètement démissionné de ses responsabilités de régulation de la mondialisation. On y va pour la photo de groupe et le golf local.

La tribune Chiraquienne sera certainement à la hauteur de celles des autres. Fustigeant un libéralisme violent, dont il applique les caractères les plus inégaux à la société Française, ou s’inquiétant de l’inaction des gouvernements face aux enjeux écologiques quand sa dernière victoire a été de pouvoir lancer le projet ITER qui éclairera peut être la salle des fêtes de Cadarache dans cinquante ans sans résoudre totalement le problème des déchets.

Et il ne sera certainement pas déplacé dans cette réunion Tupperware de « grands de ce monde ». D’illégitime, ce G8 est devenu inconsistant.

Mais revenons à notre beau pays, et à son gouvernement.

Là aussi, on peut être choqué par l’évidente inconsistance d’une équipe déjà en campagne. Il veut lutter contre le chômage en facilitant les embauches des Très Petites Entreprises (de mon temps, et je ne suis pas si vieux, on appelait ça des artisans), quand l’OCDE (qui est devenu entre temps un méga cabinet d’audit) considère que c’est plutôt les PME qui en auraient besoin. Mais c’est la France de droite. Coincée entre des monopoles et des artisans qui n’ont peut être pas envie d’atteindre une taille critique.

Ensuite, il veut promouvoir l’emploi de services aux particuliers. De quoi couler les PME dont c’est déjà le boulot. Et puis avec des abattements fiscaux à la clef (ça montre à qui ça va profiter). Cerise sur le gâteau, en exonérant l’employeur de charges sociales. C’est marrant, vous avez remarqué ? Ca fait un certain temps qu’on ne parle plus du trou de la Sécu !

Ensuite, l’un des trublions présidentiables du gouvernement préconise la discrimination positive. En oubliant au passage que ça nous forcerait à admettre la notion de race, mais bon, y a peut être du bon. Mais quelles sont ces propositions ? Ouvrir certaines places de Science Po à des élèves venant de ZEP. Ca donne l’exemple, ça permet de montrer un beur au fils à papa, ça évite de refondre la carte scolaire et d’investir dans un vrai programme éducatif. Populaire pour pas un rond, il est bon, ce Sarko.

Enfin, ce cher gouvernement compte bien protéger la FNSEA, pardon, l’agriculture française contre les attaques de la Perfide Albion.

C’est vrai que les porcheries bretonnes n’ont pas encore définitivement ruiné le sous sol armoricain. Et qu’il est indispensable de pouvoir cultiver du maïs sur un sol engraissé parce que trop pauvre pour nourrir une plante qui sert à gaver les vaches. Et d’exporter à bas prix vers des pays qui auraient bien besoin de s’en refaire une, d’agriculture…

A mesure que j’écris, je m’énerve. Pardon.

Ce Villepin le Pragmatique nous change peu du Raffarin le Communiquant. Ca brasse de l’air, ça oriente une économie vers un gouffre pour nous forcer à lâcher du lest. Ne serait-il pas temps d’en attaquer un ou deux pour haute trahison ? Dire défendre notre « modèle social » en faisant une politique aussi peu sociale, ça relèverait bien d’une coure martiale, non ?

Pendant ce temps, dans le pays de Tony qui ne pense qu’à envahir l’Irak et à transformer notre code du travail en document d’études en langues anciennes, la British Petroleum va construire, avec l’aide du gouvernement, une centrale électrique à hydrogène, produit avec du gaz naturel, tout en liquéfiant le CO2 ainsi crée et en le stockant dans d’anciens puits de pétrole.

Oh, bien sûr, c’est de la vitrine. BP avait déjà équipé certaines de ces stations aux Etats-Unis en panneaux photovoltaïques, et a sorti sans rire le « BP Diesel Ecology »…

Mais bon, je trouve que c’est un bon exemple de la mauvaise foi et du pragmatisme populiste de Jacquouille. Ou encore de la politique aubaine depuis les conneries de George de la Jungle et la naïveté navrante de Toto, qui lui permet de se racheter une virginité internationale. En effet, on aurait presque cru qu’il n’y avait plus que nous pour s’intéresser au sort des ours polaires.

En jouant sur le mode gentils-français-pacifisites-écolos contre méchants-méga-libéraux-pollueurs et va t’en guerre, il va réussir à anesthésier notre beau pays, le grand con !

J’en viens enfin à mon point.

L’autisme et l’auto satisfaction Françaises font perdre de vue que, à l’extérieur, y a des choses qui se passent, et qui mériteraient qu’on s’y attarde. Nous nous autoproclamons champions de la diversité en terme d’artisanat, quand nous sommes le pays avec le plus de supermarchés par habitant. Champion de la lutte pour l’environnement, quand nous avons presque autant de centrales nucléaires que le territoire nord américain entier. Ou champions du social, quand les vingt milles licenciements chez Nissan après la fusion avec Renault n’ont ni fait couler de larmes sur la fierté bleu blanc rouge, ni de l’encre dans les journaux, même de gauche…

Ceci posé, comme je le disais beaucoup plus haut, nous sommes déprimés, amorphes à force de ne pas réussir (à part les très gros navions).

Alors, je propose que nous changions notre discours. Que nous cessions de « revendiquer », mais que nous « osions ». Que nous apportions aux défis de ce siècle des réponses d’entrepreneur (oh, c’est beau, on dirait du Seillière).

Entreprenons !

L’agriculture française surproduit et affame l’Afrique ? Supprimons les subventions quantitatives, et basons les sur la qualité et le respect de l’environnement. Mieux, incitons les agriculteurs à diversifier leur champ d’application : qu’ils fassent de l’éthanol qu’on ajoutera à l’essence (ils font déjà ça dans l’Iowa, on va quand même pas se faire doubler par les Américains !), qu’ils produisent du méthane (comme dans quelques fermes allemandes, on va quand même pas se faire doubler par les Boches !), et fassent pousser de l’électricité en éolien et photovoltaïque ! En plus, ça insufflera de l’argent dans ce secteur, et favorisera le progrès technologique !

Entreprenons !

Le pétrole coûte cher et déstabilise des régions entières (vous avez vu ? J’ai même pas mentionné la pollution…) ? Chauffons-nous aux granules de bois ! Voire même aux déchets de bois et de carton ! Ca coûte moins cher, et ça développe l’emploi local !

Entreprenons !

Le trou de la sécu ? Celui des Assedics ? Donnons la priorité aux projets qui génèrent des emplois ! Pour un même coût, sur le long terme, un champ d’éolienne produisant la même quantité d’énergie qu’une centrale nucléaire crée plus d’emploi que cette dernière ! Soumettons les aides de l’état à la quantité d’emplois créée !

Entreprenons !

Les entreprises n’en peuvent plus des charges sociales ? Elles ont parfois besoin d’air ? Créons une Assedic des entreprises ! A laquelle elles cotiseraient, et de laquelle elles auraient des aides en cas de besoin. Imaginez Messier faire la queue devant la machine à tickets… Ca, c’est du social juste et égalitaire !

Entreprenons !

Les Français achètent trop de médicaments trop cher ? Demandons aux entreprises pharmaceutiques de faire figurer la part du prix de leur remède miracle donné à la publicité, aux séminaires, au démarchage des médecins, et invitons les Français à choisir en connaissance de cause !

Entreprenons !

La pollution fait tousser Youki ? Mettons les camions sur les trains ! Fermons les centres ville aux voitures ! Développons les transports collectifs doux et de proximité ! Ca fait plus d’emplois pour moins de pollution.

Entreprenons !

L’insécurité ? Détruisons les grandes barres d’immeubles, et construisons des maisons habitables. En pisé, tiens, Villefontaine, dans l’Isère, a construit un complexe de trois cents logements sociaux comme ça, et non seulement c’est beau, mais ça développe l’emploi local (de la terre, ça se trouve sous le sabot d’un cheval). On pourrait même réserver les emplois ainsi crée aux futurs habitants ! De quoi donner un sens au chez soi…

Entreprenons !

Les délocalisations ? D’une part, en mettant les camions sur des trains, le coût du transport des marchandises va faire la proximité du point de construction un critère de compétitivité. D’autre part, ça serait bien que l’OMC fasse son boulot, non ? Faire du salaire de l’ouvrier Chinois un indice de la taxation des produits importés, ça serait pas mal. Une taxe qui baisse au fur et à mesure que le salaire chinois augmente. Et puis, si on veut vraiment que les citoyens s’intéressent à l’Europe, ça serait bien d’en faire une Europe des citoyens. Avec tous les mêmes droits sociaux. Et là, on pourra parler de compétitivité (pour l’instant, j’appelle ça de la triche, mais bon).

Mais avant tout ça, si on détaxait les productions locales (ah ouais, ça sonne bien, « détaxer ») ? Dans un rayon inférieur à deux cents kilomètres, paf, la TVA à 10 % ! Et on emmènera plus les vaches limousines se faire abattre dans un abattoir italien.

Je pourrais continuer comme ça longtemps. Sans utiliser le mot « service public », ni taxe, ni toutes ces choses qui fâchent les « libéraux ». Uniquement en parlant de projets, d’entreprenariat, et même en baissant les taxes ! Parce qu’en mettant en application ces éléments de programme (je vous dirais quand je compte me présenter à la présidentielle), on génère des vrais boulots. Donc des recettes fiscales. Donc, adieu trou de la Sécu, déficits, publics, et même ISF (ça a l’air de leur faire tellement mal, et ça rapporte si peu).

Alors ? J’ai bon ?

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Commentaires
T
It was a truly remarkable post! Thanks for sharing it. Keep updating your post with valuable information... Regards
Quand je ne la ferme pas, je l'ouvre.
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